Arrimage et offre de services publique-privée en physiothérapie: vers une garantie d’accès?

NDLR: La parution de notre premier article de blogue a suscité quelques réactions chez nos lecteurs. Dans ce contexte, l’AQP désire préciser sa pensée quant à l’offre de services actuellement insuffisante du milieu public et l’arrimage nécessaire entre les services publics et l’offre privée de physiothérapie.

Au Québec, nous avons la chance de pouvoir profiter d’un réseau toujours grandissant de cliniques de physiothérapie. Ce réseau privé, partenaire du régime public grâce à ses liens avec la CSST et la SAAQ, permet aux accidentés du travail et de la route d’avoir accès aux traitements prescrits dans des délais raisonnables.

Le réseau des cliniques privées de physiothérapie fait donc partie intégrante de l’offre de services en réadaptation physique et permet d’accueillir un bassin de patients que le réseau public ne pourrait certainement pas absorber.

Mais force est d’admettre que le réseau public en physiothérapie a considérablement réduit son offre de services en raison de coupures continues depuis nombre d’années et d’une croissance anémique. Par conséquent, plusieurs patients n’ayant pas de régime privé d’assurances et n’étant pas en mesure de défrayer des coûts de services de physiothérapie sont alors privés de soins. Pire encore, le problème d’accès réside aussi dans les délais que l’on retrouve au sein du réseau public lorsque le patient y entre pour une problématique de santé physique non liée à un accident de la route ou professionnel. Par exemple, dans son rapport annuel 2014, la Protectrice du citoyen relevait l’exemple suivant:

« La mère d’un enfant d’un an et demi atteint d’une déficience motrice particulièrement rare s’est adressée au Protecteur du citoyen en raison d’un long délai avant de recevoir des services du centre de réadaptation de sa région. Mentionnons que la situation de l’enfant était jugée de niveau de priorité élevé. Selon le Plan d’accès aux services pour les personnes ayant une déficience du ministère de la santé et des services sociaux, l’enfant devait recevoir les services requis à l’intérieur d’un délai de 90 jours suivant son inscription. Or, le centre de réadaptation envisageait plutôt des délais d’environ deux ans. Compte tenu du grand nombre d’enfants en attente d’un service, il était impossible pour l’établissement de répondre à la demande dans les délais prescrits avec l’enveloppe budgétaire dont il disposait. »

Bien que la question du sous-financement des établissements publics se pose encore et toujours, on peut également se demander dans quelle mesure un réseau bien établi de cliniques privées de physiothérapie, comme c’est le cas au Québec, pourrait être mis à contribution dans de telles situations.

L’exemple de la loi 33

En 2007, le Gouvernement du Québec procédait à l’adoption de la loi 33 pour permettre un accès plus rapide aux chirurgies de la hanche, du genou ou pour les cataractes. Dans cette optique, le réseau des cliniques privées spécialisées était mis à profit et venait prendre le relais du système public en cas de délais trop importants. De l’avis de l’AQP, le gouvernement aurait tout intérêt à envisager d’étendre les dispositions de la loi 33 aux services de réadaptation physique, et ainsi prendre des ententes avec diverses cliniques privées afin de répondre aux besoins des patients dans les délais médicalement acceptables.

Pour l’AQP, l’amélioration de l’accès à des services de physiothérapie repose sur plusieurs facteurs. Tout d’abord, il faut reconnaître les trous de services du réseau public et la place insuffisante des professionnels de la physiothérapie, physiothérapeutes et T.R.P., dans les services publics de santé au Québec. Parallèlement, il est important de réfléchir au décloisonnement de l’offre publique et de l’offre privée. Bien entendu, ce changement nécessite tout d’abord une meilleure reconnaissance de l’apport de la physiothérapie dans la santé globale des Québécoises et des Québécois. Une chose est certaine, il est plus que temps de faire valoir l’impact que pourrait avoir une meilleure couverture de services en physiothérapie sur la santé des Québécoises et des Québécois, mais aussi sur une utilisation plus efficiente des argents investis dans notre système de santé. Il faut clairement démontrer qu’une offre plus étendue de services en physiothérapie, autant privée que publique, est nécessaire et qu’elle doit s’appuyer sur les besoins en réadaptation physique de la population, besoins qui sont malheureusement souvent relayés au second plan.

Ces questions vous préoccupent? Venez vous faire entendre lors de l’assemblée de fondation de l’AQP, qui aura lieu le 14 novembre prochain en marge de l’événement Physio 360. C’est un rendez-vous!